Conseil, ordre, corporation
Comment vérifier si j’emploie la majuscule ou la minuscule dans un texte précis ? Exemples : conseil d’administration et corporation.
Dans le cas précis de la locution conseil d’administration, le mot conseil ne prend pas de majuscule. Voici quelques exemples :
La société Machin est dirigée par un conseil d’administration de dix membres.
Le conseil d’administration a voté contre la proposition.
Elle siège au conseil d’administration depuis un an.
Il est membre de plusieurs conseils d’administration.
De façon générale, quand l’expression qui contient le mot conseil désigne un groupe de personnes formé à l’intérieur d’une société ou d’un organisme pour participer à sa gestion, le mot conseil ne prend pas de majuscule :
le conseil d’administration
le conseil de direction
le conseil municipal
En revanche, le mot conseil (et l’éventuel adjectif qui précède) prend la majuscule quand l’expression désigne un organisme qui a un caractère unique dans un État, à l’échelle d’un gouvernement, ou, à plus forte raison, à l’échelle internationale :
le Conseil des ministres
le Conseil constitutionnel (France)
le Conseil du patronat du Québec
le Conseil de l’Europe
le Haut Conseil de la Francophonie
le Conseil de sécurité des Nations unies
Pour revenir à la locution conseil d’administration, on la réduit parfois par ellipse au mot conseil quand le contexte est suffisamment clair :
Le conseil a voté contre la proposition.
Elle siège au conseil depuis un an.
On peut aussi réduire cette locution par abréviation (cons. d’admin. ou c. a.) ou par siglaison (C. A. ou C.A.). La différence est que, en principe, une abréviation au sens strict se prononce de la même façon que la forme longue et s’écrit avec des minuscules. Dans les exemples qui suivent, les abréviations se prononcent « conseil d’administration » :
Le cons. d’admin. a voté contre la proposition.
Elle siège au c. a. depuis un an.
Mais cette locution est souvent réduite à ses initiales aussi bien à l’oral qu’à l’écrit, ce qui en fait un sigle épelé, qu’on représente en principe par des majuscules et des points abréviatifs, avec ou sans espace : C. A. ou C.A. Dans les exemples qui suivent, le sigle se prononce « cé a » :
Le C. A. a voté contre la proposition.
Elle siège au C.A. depuis un an.
On rencontre souvent le sigle écrit sous la forme CA, mais une telle forme sans points abréviatifs devrait en principe être réservée aux sigles acronymiques, c’est-à-dire qui se prononcent syllabiquement, ce qui donnerait ici la prononciation « ka ». Ce n’est pas le « cas » de ce sigle, qui est plutôt prononcé par épellation « cé a ».
Les exemples qui précèdent nous ont permis de marteler subtilement au passage un autre point : on dit bien siéger à un conseil d’administration et non pas *siéger sur un conseil d’administration, tournure impropre calquée de l’anglais.
Quant au mot corporation, il prend généralement la minuscule et désigne de nos jours l’ensemble des personnes qui exercent une même profession, un même métier.
Les traditions de la corporation des typographes.
Il parlait dans le jargon de sa corporation.
Si les membres d’une corporation sont réunis en un groupement ayant une personnalité juridique, on parle plutôt d’ordre professionnel ou d’ordre tout court. (L’expression corporation professionnelle est à éviter.) Comme ces entités sont généralement uniques au niveau d’un État, le mot ordre prend la majuscule dans leur dénomination :
l’Ordre des pharmaciens (Belgique)
l’Ordre national des infirmiers (France)
l’Ordre des architectes du Québec
Au Canada, sous l’influence de l’anglais, le mot corporation est souvent utilisé à tort pour parler d’une organisation à caractère commercial qui produit des biens ou des services. Cet usage subsiste d’ailleurs dans certains textes législatifs. Dans ce sens, voici quelques équivalents à préférer à corporation :
société
entreprise
firme
compagnie
société commerciale
société par actions
société à responsabilité limitée
personne morale
Dans la langue courante, les mots société, entreprise, firme et compagnie peuvent être utilisés indifféremment comme synonymes. Dans un contexte juridique, on choisira le terme avec soin, car les textes de loi établissent de subtiles distinctions entre ces concepts.
Pour revenir à la question initiale et générale, l’emploi de la majuscule est un vaste sujet qui dépasse le cadre d’une chronique. Certains Points de langue précédents ont abordé le sujet, par exemple dans le contexte des raisons sociales ou celui des titres d’œuvres. Dans le Guide linguistique d’Antidote intitulé Orthographe, on peut consulter la section intitulée Majuscule, qui contient plus d’une quarantaine d’articles. Le correcteur d’Antidote peut détecter plusieurs types d’erreurs liées à l’emploi de la majuscule.