Quelle préposition porter cette saison ?
Pourquoi dit-on en hiver, mais au printemps ? Peut-on dire à l’hiver ou en printemps ?
À première vue, le choix des prépositions avec les noms des saisons pour former des compléments adverbiaux de temps peut sembler assez arbitraire. On peut toutefois dégager certaines tendances.
Aspect duratif
Lorsque la saison est considérée comme un intervalle de temps à l’intérieur duquel a lieu l’évènement dont on parle (que cet évènement soit vu comme ayant une durée ou non), on a le choix entre plusieurs prépositions : durant, pendant, en et dans.
Avec les deux premières, les quatre noms de saisons se comportent régulièrement :
Durant le printemps, il a épousé sa dulcinée.
Pendant l’été, la région grouille de touristes.
Durant l’automne, le président a été réélu.
Pendant l’hiver, elle a rédigé sa thèse.
Avec la préposition en, on aurait en principe ces formes :
en le printemps
en l’été
en l’automne
en l’hiver
Mais ici intervient une règle qui vaut pour certains types de compléments adverbiaux. En français moderne, selon le genre et l’initiale du nom N, la combinaison de la préposition en et du déterminant défini (l’, le, la, les) est remplacée ainsi :
en l’N → en N
en la N → en N
en le N → au N1
en les N → aux N
Par exemple, cette règle vaut généralement avec les noms de pays :
en l’Arménie, en l’Uruguay → en Arménie, en Uruguay
en la Roumanie → en Roumanie
en le Paraguay → au Paraguay
en les Pays-Bas, en les Maldives → aux Pays-Bas, aux Maldives
Si on applique cette règle à nos noms de saisons, on obtient :
en l’été, en l’automne, en l’hiver → en été, en automne, en hiver
en le printemps → au printemps
Cela explique pourquoi le tour en printemps est plutôt inusité, tout comme en Paraguay.
En reprenant nos exemples de phrases ci-dessus, on obtient :
Au printemps, il a épousé sa dulcinée.
En été, la région grouille de touristes.
En automne, le président a été réélu.
En hiver, elle a rédigé sa thèse.
Quant à la préposition dans, elle s’emploie surtout quand le nom de la saison est accompagné d’un élément subordonné (épithète, complément) :
Dans l’automne qui a suivi, le président a été réélu.
Outre les prépositions mentionnées, ajoutons que l’on peut aussi se passer carrément de préposition pour exprimer l’aspect duratif :
Le printemps, il a épousé sa dulcinée.
L’été, la région grouille de touristes.
L’automne, le président a été réélu.
L’hiver, elle a rédigé sa thèse.
Dans l’usage, on constate que les deux noms printemps et automne s’emploient moins fréquemment ainsi, sans préposition, sauf s’ils sont accompagnés d’un élément subordonné :
Le printemps dernier, il a épousé sa dulcinée.
L’automne qui a suivi, le président a été réélu.
Remarquons que l’aspect duratif peut parfois se doubler d’un aspect répétitif. Par exemple, l’expression en été ou l’été peut, selon le contexte, signifier « durant cet été-là » ou bien « durant chaque été, durant tous les étés ». L’aspect répétitif est présent dans nos exemples estivaux ci-dessus, où il est question de la région grouillante de touristes.
Aspect ponctuel
Lorsque la saison n’est pas considérée comme un intervalle, mais plutôt comme un point sur l’axe du temps (aspect ponctuel), la préposition à peut en principe être employée :
à le printemps → au printemps
à l’été
à l’automne
à l’hiver
Avec printemps, la préposition au est ici la contraction normale de la préposition à et du déterminant défini le.
Voici des exemples d’emplois ponctuels plutôt que duratifs :
À l’automne, les touristes ont déserté la région.
À l’hiver, sa thèse n’était pas commencée.
Ici, à l’automne et à l’hiver signifient respectivement « au moment où arrive l’automne » et « au moment où arrive l’hiver » plutôt que « durant l’automne » et « durant l’hiver ».
En pratique, on constate encore ici une différence de fréquence entre les couples été/hiver et printemps/automne : ces constructions avec à sont moins courantes avec les noms été et hiver. On les trouve néanmoins sous la plume de bons auteurs.
Dans certains contextes, la distinction entre aspect duratif et aspect ponctuel n’est pas clairement tranchée et, en pratique, l’usage ne respecte pas toujours les tendances2 décrites ci-dessus, mais celles-ci devraient vous guider dans le maniement de ces prépositions en toute saison.
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On explique parfois le passage de en le vers au par le fait que, en ancien français, en le se contractait en ou, mot qui aurait plus tard été confondu avec au (contraction de à le). ↩
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Voici deux articles pour en savoir plus : Molinier, Christian. « Les quatre saisons : à propos d’une classe d’adverbes temporels », Langue française, no 86, mai 1990, p. 46-50 ; Office québécois de la langue française, En été ou à l’été, Banque de dépannage linguistique, 2002. ↩